Dans cet affaire, un remplaçant a eu des comportements de rapprochements inappropriés envers des élèves du cycle d’orientation et de l’école de culture générale. Le département de l’instruction publique a résilié les rapports de travail et a refusé de renouveler son autorisation d’effectuer des remplacements au sein de l’instruction publique genevoise.
Nous mentionnons ici cet arrêt pour trois raisons.
Premièrement, ce cas est exemplatif d’une réaction exemplaire de l’ensemble des acteurs qui ont agis de façon claire en reconnaissant le caractère inapproprié de la relation en train de se tisser entre l’encadrant et les jeunes. Qui ont ensuite procédé à un premier entretien afin de mettre en garde l’encadrant. Avant de le renvoyer dès le deuxième cas problématique. Cette affaire rappelle la nécessité de réagir rapidement en cas de soupçons.
Deuxièmement, cette jurisprudence (et l’arrêt de première instance) exemplifie des comportements inadéquats et les qualifie comme tel:
Les premiers comportements
« À la fin d’un cours, [Il] aurait demandé à [une élève] de rester. Il lui aurait dit qu’il n’était pas censé lui dire cela, que cela devait rester entre eux et que si cela n’était pas possible il ne lui dirait rien. Comme l’élève s’était déclarée disposée à l’écouter, il lui aurait dit qu’il avait beaucoup apprécié de travailler avec elle et qu’il aurait souhaité la revoir. Comme l’élève était visiblement mal à l’aise, il lui aurait dit d’oublier qu’il lui avait dit cela, qu’il ne lui demandait pas de devenir sa « copine » mais qu’il avait beaucoup apprécié de travailler avec elle. » Lorsque la directrice a entendu les élèves. « L’une d’elles avait indiqué qu’il avait discuté avec elles de « K‑Pop » (musique pop coréenne). Lorsqu’une des élèves lui avait montré une vidéo d’un groupe qu’elle aimait, il avait dit à propos de la tenue vestimentaire des chanteuses qu’il aimait bien les « crop-tops » (des vêtements hauts courts qui laissent voir le nombril de la personne qui les porte) et les mini-jupes. Il aurait également demandé à cette élève si elle était d’accord de lui donner des cours de coréen. L’autre camarade avait indiqué qu’il avait proposé de lui donner des cours particuliers d’anglais. Enfin, les jeunes filles avaient indiqué qu’il parlait beaucoup de sa vie privée en classe. » (ATA/358/2025 du 01.04.2025 en faits A.b)
le deuxième comportement ayant conduit au renvoi:
« Le lundi [..] lors [..] du cours d’anglais, il lui avait dit de venir le voir à la fin du cours. À la fin du cours, il avait fermé la porte de la classe et demandé à son amie de sortir. Il lui avait alors dit en anglais puis en français : « c’est votre anniversaire vendredi, non ? ». Elle avait répondu « yes ». Il avait alors dit « j’ai un cadeau pour vous, est-ce que vous voulez un cadeau ? ». Étonnée et mal à l’aise, elle avait répondu par l’affirmative. Il avait alors sorti une petite pochette en coton de son sac à dos et la lui avait donnée, main tendue en offrande. Elle n’avait pas ouvert le cadeau par peur d’apprendre de quoi il s’agissait. Il lui avait dit à deux reprises qu’il s’agissait d’un secret entre eux et qu’elle ne devait en parler à personne. Elle avait ensuite ouvert le cadeau en présence de son amie à la cafétéria, pour découvrir qu’il s’agissait d’un collier en or plaqué » (extrait de la décision cantonale ATA/358/2025 du 01.04.2025, concid. A.d)
« La Cour de justice a jugé que le fait non contesté pour un enseignant d’offrir un bijou à une de ses élèves était contraire à l’obligation de conserver une bonne distance et de maintenir la relation enseignant-élève sur un plan strictement pédagogique et constituait une violation de ses devoirs professionnels et de ses obligations légales. Il pouvait être interprété comme un geste ressortissant à tout le moins au registre sentimental. La portée d’un tel geste ne devait pas échapper à une personne adulte appelée à exercer des responsabilités avec des élèves. Par ailleurs, le recourant avait déjà été informé de son devoir de maintenir en toutes circonstances une posture professionnelle adéquate en évitant toute proximité inappropriée avec les élèves ou toute situation pouvant prêter à confusion. » (TF 1C_215/2025 du 19 mai 2025 concid. 3).
Troisièmement, une directive spécifique (D.RH.00.25 du 12 mai 2020) a été adoptée au sein du département de l’instruction publique qui a servi de base au renvoi de la personne. Nous considérons que ces éléments sont tirés du bon sens, en effet la réaction des responsables d’une personne adoptant de tels comportements devrait être similaire même en absence de documents spécifiques.
Si une telle directive n’est pas strictement nécessaire pour terminer l’engagement d’un bénévole, reprendre certains éléments de langage dans leurs documents internes (charte, contrat de bénévole, règlement interne, concepts de sécurités…) peut faciliter la prise de décision et la communication des organismes encadrant des jeunes qui seraient confrontés à une telle situation :
« [L]a directive [..] prévoit que, dans toute relation, notamment dans le cadre professionnel avec des élèves apprentis et stagiaires, les membres du personnel doivent garder une distance adéquate y compris sur les réseaux sociaux. Le personnel enseignant, en raison du rôle d’autorité qu’il exerce sur les élèves et, en conséquence, de l’influence sur ces derniers, se doit de veiller à adopter, que ce soit en classe ou en dehors, un comportement qui préserve la confiance que les élèves, les parents et la collectivité ont placé en lui. En particulier, les comportements suivants à l’égard des élèves, quel que soit leur âge, constituent une violation des devoirs de service, y compris sur les réseaux sociaux : propos ou comportement discriminant, dévalorisant, humiliant, dégradant portant notamment sur le physique, les origines, l’orientation ou l’identité sexuelle. » (ATA/358/2025 du 01.04.2025, concid. 4.4)
Si vous êtes confrontés dans votre pratique associative ou dans vos camps ou activités de jeunesses à des comportements qui vous semblent problématiques ou inadéquats, nous rappelons que des organismes sont actifs sur ces questions :
https://www.espas.info/ (association vaudoise de prévention des abus sexuels)
https://www.kinderschutz.ch/fr
https://www.buendner-standard.ch/fr?id=3 les standards grisons : outils de prévention de la violation des limites
aide aux victimes : https://www.opferhilfe-schweiz.ch/fr/ou-puis-je-trouver-de-laide/
en allemand
https://www.stiftung-gegen-gewalt.ch
Cette revue de Jurisprudence publiée sur le blogue responsabledecamps.ch le 20 juin 2025